Tunisie
Sept millions d‘électeurs tunisiens retournent aux urnes dimanche afin d‘élire un Parlement à la composition imprévisible, trois semaines après avoir sanctionné la classe politique au pouvoir lors du premier tour de la présidentielle.
Contrairement à l‘élection du chef de l’Etat, ces législatives n’ont pas suscité beaucoup d’intérêt auprès des Tunisiens.
Elles sont pourtant cruciales dans le berceau du Printemps arabe, où le Parlement est chargé des questions les préoccupant le plus: l‘économie qui peine à décoller, le chômage bien ancré, les services publics défaillants et l’inflation qui ne retombe pas.
Les électeurs ont l’embarras du choix pour ces deuxièmes élections législatives depuis la Constitution de 2014: 15.000 candidats pour 217 sièges, et surtout une multitude de partis sans clivages clairs.
Les grandes familles politiques, minées par des luttes de pouvoir, se présentent en ordre dispersé, comme pour la présidentielle du 15 septembre.
Indépendants
Les élections sont de toutes les conversations depuis le décès du président Béji Caïd Essebsi en juillet dernier, qui a entraîné une présidentielle avancée de sept semaines.
Mais la campagne pour les législatives, qui se sont retrouvées coincées entre les deux tours de la présidentielle en raison de ce bouleversement du calendrier électoral, a été largement éclipsée.
“La majorité des gens est complètement désintéressée par les élections législatives,” reconnaît un candidat en campagne, l’avocat Ghazi Mrabet.
Les rebondissements judiciaires ayant abouti au maintien en détention du candidat à la présidentielle Nabil Karoui, homme d’affaires soupçonné de blanchiment et incarcéré depuis le 23 août, ont focalisé l’attention.
Trois débats télévisés inédits, organisés entre des représentants des différentes familles politiques visant le Parlement, n’ont pas rencontré le même succès des soirées politiques avec les candidats au premier tour de la présidentielle.
Nombre d’observateurs s’attendent à ce que la dynamique du vote sanction qui a écarté de la course à la présidence les dirigeants politiques déjà connus, se poursuive lors des législatives, dont les résultats préliminaires sont attendus le 9 octobre.
Les indépendants pourraient ainsi se tailler la part du lion au Parlement, sans qu’il soit possible d’anticiper leurs stratégies une fois élus.
Le parti crée en juin par Nabil Karoui, Qalb Tounes, qui a fait campagne en proposant un plan de lutte contre la pauvreté, pourrait être le premier parti au Parlement, selon des sondages officieux.
Avant d‘être incarcéré, M. Karoui avait auparavant sillonné le pays durant plusieurs années, distribuant biens et denrées sous l’oeil des caméras de la télévision qu’il a fondée, Nessma, qui continue de faire campagne pour lui, en dépit du code électoral.
Son adversaire pour le second tour de la présidentielle, l’universitaire Kais Saied, une farouche indépendant, s’est refusé à toute consigne de vote, et son électorat, très hétéroclite, devrait se disperser.
Le parti d’inspiration islamiste Ennahdha, dont une partie de l‘électorat avait été conquis par ce juriste austère, lui a apporté son soutien.
Dans une tentative de reconquérir des bases qui lui reprochent d’avoir pactisé avec l‘élite politique pour gouverner ces dernières années, Ennahdha, principale formation dans le Parlement actuel, a en revanche officiellement exclu toute alliance avec le parti de M. Karoui.
Partis multiples
Mais Ennahdha, concurrencée par un nouveau parti islamo-populiste, le mouvement Karama, pourrait voir son assise continuer à fondre après être passé de 89 sièges en 2011 à 69 en 2014.
Karama, mené par un avocat connu pour avoir assuré la défense de salafistes, Seifeddine Makhlouf, tente de se présenter comme allié à Kais Saied, ce que ce dernier a démenti.
Conséquence de cette offre multiple dans une ambiance fébrile : le Parlement s’annonce très fragmenté et certaines formations sont à couteaux tirés, ce qui promet des négociations compliquées pour former une majorité.
“Il est possible qu’aucune majorité ne se dégage pour former un gouvernement dans les délais prévus par la Constitution”, a averti Michael Ayari, analyste chez ICG.
Une incertitude prolongée serait malvenue alors que la Tunisie peine déjà à répondre aux attentes de sa population. Les Tunisiens sont exaspérés du fait que les avancées démocratiques n’ont pas répondu aux autres revendications de la révolution de 2011: “travail et dignité”.
Si le pays a pu juguler la menace terroriste qui avait mis à genou le secteur touristique en 2015, il reste sous perfusion du Fonds monétaire international, et sommé de réduire une dette paralysante.
AFP
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